Prendre la direction du Lot un dimanche de Janvier, c’est reprendre un peu de liberté, au gré du vent, et c’est finalement tout simple… Alors que les mauvaises nouvelles secouent la société, que les perspectives d’avenir paraissent incertaines, que peu de choses incitent au sourire…

Alors !, l’appel de la nature devient refuge, vital pour l’esprit. On prend ses « pompes », une réserve d’eau, de quoi « grailler » et on part courir. On se lance un nouveau défi, seul face à soi même.

Très vite dans la nuit, sorti des ruelles de Cours, le sentier s’élève devant moi et mes idées avec. Autour, le paysage s’ouvre à la lueur des frontales, à la chaleur des flambeaux. La gelée matinale scintille sous mes pieds, causses et vallons se mêlent à mes sensations. Et elles sont bonnes ! Le lion est en « pattes » fringuantes. Avec le peloton de tête, on s’enivre de l’air qui chauffe nos poumons, notre cœur bat la chamade face au soleil levant.

Ce trail de l’Aqueduc est splendide, il parle, il raconte une histoire. Car nous faisons exister le chemin en l’arpentant, en cherchant la trace, en pensant fort à nos rudes ancêtres. Le chemin existe parce qu’il a été tracé par d’autres, ne l’oublions jamais. Souvent il se fait falaise, ravine, escalier naturel ou aqueducs. Ce parcours marathon est bien pensé, il reflète cette passion commune du trail. Il incite à l’effort, à se dépasser, mais pas que… Car pour moi les lauriers et la « boîte » ne sont pas finalités. La course m’apporte la connaissance. D’une région et son terroir, de soi et de ses limites. L’apprentissage de l’humilité, ici pas de place à l’argent, aux classes ou au pouvoir, ici dans l’effort, la course à pied laisse chacun face à soi même.

La mi- course est derrière moi, parfois je ralentis la cadence pour laisser place au regard, au plaisir d’être là. Ce matin la lumière est superbe, le coin est attirant, sauvage, le sentier joueur au possible. Et parfois au détour d’une truffière mes papilles frétillent…

Le cap des 30 bornes est face à moi, tout devient plus raide, plus éprouvant. Un seul recours, le mental, quand je cours, je pense. Et souvent je plonge mon esprit dans l’affect. La famille, les amis, les amours, la vie quoi ! Ce n’est pas un acte gratuit, penser à quelqu’un c’est se mettre en sa présence. Du coup je cours en leur compagnie, ils deviennnent mon carburant.

Et sur ce final de l’Aqueduc, heureusement qu’ils étaient nombreux à soutenir mon esprit. Les éléments s’en mêlent, à 5km de l’arrivée, le calcaire du causse a raison de mes appuis, le lion est bien touché. Malgré la frustration, la colère, il faut repartir de l’avant, puiser dans ses ressources les plus profondes…je vous disais…la connaissance de soi ! Je m’accroche, je m’arrache face à l’adversité. Sur ce dernier tronçon c’est la totale, échelles, cordes, passage à l’eau et escalades, mais rien n’y fait, à l’approche de Cours, le lion est toujours là, plus fier que jamais. Deux concurrents m’ont repris, peu importe, une belle étoile m’attendait à l’arrivée, la souffrance est déjà loin , je repars sur le cours de mon chemin…

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