Les 24 heures sont sorties du domaine confidentiel, dans laquelle je les avais laissées il y a un quart de siècle. C’est devenu une épreuve certes particulière mais qui a un public plus dense que sa trop modeste communication ne le laisserait penser.

C’était donc le jeudi de l’Ascension vers 9 h 30, où je descends dans la parc de la Guierle, à Brive. D’autant plus gaillard que j’avais reconnu la veille le secteur stratégique, le parcours, et posé quelques questions adaptées pour essayer de masquer ma lointaine double expérience sur la distance. Dossard numéro 100 (attribué par alphabet masculin, là au moins, avec le S, puis le U, je suis certain de n’être jamais numéro 1…). La table 100 devrait être entre le 99 et le 101 ? Oui mais non, car l’organisation vraiment haut de gamme, a fait en sorte de privilégier la convivialité. Si par exemple, était inscrit un Lacaunais nommé Dupont (ou pourquoi pas Cambon ?), il aurait eu un dossard autour du n°30, et le staff Dupont (ou Cambon) aurait été éloigné géographiquement du staff Suc (modeste en l’occurence, mais Gisèle a suivi hors vie et nuit ordinaire), et donc adieu l’esprit d’équipe… Vous me suivez ? Alors j’arrive dans cet espace avec toiture, et je pose mes deux bouteilles d’eau, ma dizaine de barres, et mon carton de prévision sur la table 100.

« Hou, mais je suis un amateur », lancé-je aux deux staffs des tables voisines après avoir parcouru ce hall, où la plupart des concurrents avaient à dispo, des dizaines de boîtes alimentaires, des tableaux préétablis, une infrastructure, pliant, tente, glacière, etc. « Mais… nous aussi », répondent-ils en choeur. Voilà qui augure bien d’une future sympathie. Juste, je voudrais signaler que pour confirmer la théorie sur le hasard que j’ai développé avant, le voisin savoyard Stéphane Richard (215 km l’an dernier) avait toutes les chances pour réussir « Brive », et au bout de trois heures, il était déjà à la ramasse (il me semble que je suis devant au classement final), ne restant sur site que pour « écouter » sa femme (et moi un peu). Tout s’est déroulé convenablement selon mes prévisions horaires (arrondies au kilomètre), en léger dégradé, partant dans un créneau 8 – 9 km à la première heure, avec une septième heure entre 63 et 71 km, une 12ème entre 93 et 105, une 16ème entre 120 et 136, une 20ème entre 147 et 167, et un final entre 171 et 195 km. A posteriori, je ne suis pas mécontent de ce découpage (je le garde).

Tout s’est bien déroulé, soleil modeste de 10 heures à 20 heures où j’avais parcouru 83,5 km. Pas trop mal jusqu’à deux heures du matin, où en marchant un peu j’étais encore resté dans les clous inférieurs : 121 km à l’heure 16, tout en perdant une place (redevenu n°7 au classement M3, mais en considérant sur site un peu plus tôt qu’un « cador » M3 n’était plus sur le circuit). Et puis, vers 2 heures et demie – c’est terrible ! -, je n’ai plus eu envie. « Mais il n’y avait pas de lit de camp prévu ? » -Si, si, c’est là-bas, près du speaker. Stéphane doit y être », me renseigne la voisine. Pendant une heure : allongement, petite sieste malgré les micros, puis quelques autres tours, manière de tuer le temps et de ne pas se laisser gagner par le froid. Pas d’amertume pour autant. Peut-être en raison de la sympathie que l’on ressent auprès des stands. Puis re-lit de camp. Puis re-tours en marchant. Enfin tout un cérémonial, championnat de France oblige pour préciser à 24 heures pétantes où l’on se trouve sur le parcours. Et autant de clinquant (que j’apprécie en fin de compte) lors du protocole avec Marseillaise incorporée.

Le bilan chiffré n’est pas exceptionnel, j’en conviens. Mais… outre que quatre jours après, j’ai gommé le plus dur (pour la vie courante), j’ai presque déjà envie d’y revenir (qu’est-ce que c’est bête, un athlète ! ). En tout cas, je vais marquer tout sur la prépa, y compris ce qui a été positif (entraînement pour six mois à raison d’un jour sur deux insuffisant certes, mais non-bourratif, sur des plages de trois heures en moyenne, marathon à M – 2, semi à M – 1, mais pas d’autres courses ; arrêt à J – 10). Et tout sur ces 144 km. « André, est-ce votre dernier mot ? – Oui, c’est mon der… Non, je veux dire… « à bientôt ».

Plus fort ! plus haut ! plus loin ! plus vieux !