Pour moi, le déplacement au marathon givré d’Orléans Sologne répondait à un double paramètre : en un, voir un (même LE) fils qui est enchaîné dans sa nouvelle entreprise en région parisienne (car son transfert au mercato de mi-juin a comme conséquence de produire des droits à congé à partir de la fin mai 2019). Et en deux : me tester sportivement (état de forme, faculté de récupération) après une année 2018 riche en longues distances. Résultat : le « petit » va bien. Et le « grand » pas trop mal. Bien sûr pas question d’évoquer les temps de jadis (3 h 35 puis 3 h 18) sur ce même marathon givré : c’était quand j’étais jeune, il y a un quart de siècle. Et même un peu plus : 1991 (premier marathon) et 1992. Disons une éternité. En ce temps-là, je ne courais pas pour passer le temps, mais par motivation : évacuer le spleen de la vie, ou du moins de ses périodes difficiles (d’autres choisissent le divan du psy…).

Mais aujourd’hui c’est différent. La retraite, c’est la période du temps libre, non ? Peut-être, mais cher lecteur, il faut l’intégrer : André Suc, ici présent, ne court pas pour passer le temps. Mais pour le championnat de France (des 24 heures), ou du moins en vue du. Tiens, comme son voisin de parking, qui était venu avec une voiture de son âge (205 de bas de gamme, entretenu avec une modeste considération) depuis Limoges : « Ouais, je suis content, j’ai fait moins de 3 h 45. Comme je suis V3, c’est le minimum pour le championnat de France. » Encore un qu’il faudra convertir aux joies de la belote, si je veux m’approcher du podium… Mais d’abord le questionner : « Et le site du « France », il est déjà connu ?  – Non, me rétorque-t-il, mais de toute façon, je ne veux pas y aller : c’est juste pour le fun… » Inconscience ? Amour de l’acte gratuit ?

La Sologne, c’est plat comme une assiette. Et le parcours s’offre de longues lignes droites entre des bois et des champs, d’immenses champs dépourvus de haies. Objectif ? Au plafond 4 heures ; au plancher 4 h 15. Pas question après les 100 km de Millau en mode compét’, il y a deux mois ou sept semaines de s’approcher du record du crépuscule : 3 h 52 à Albi. Soit dit en passant, par comparaison, coup de chapeau à l’équipe tarnaise de Philippe Aubert. Ici l’organisation est plus fruste. Peut-être pas un hasard si les 1200 arrivants des années 1990 ont fondu comme la gelée blanche au soleil. Mais qu’importe, merci d’exister et demain un nouveau souffle viendra peut-être.

Après une pause technique vers le km 10, je suis happé par le meneur d’allure des 4 h, vers le km 15. Je navigue avec lui jusqu’au km 25, de concert. Mais avec fluctuation : ce dernier en sous-régime tantôt se laisse aller à sa propre allure marathon, tantôt la corrige en prenant un tempo trop faible. Au km 25, je trouve mon propre rythme : un train naturel qui ne demande pas (trop) d’effort apparent. Bref, de bonnes sensations qui s’arrêtent vers le km 35. Dès lors, il ne reste plus que 7 km : même à l’arraché, je dois pouvoir contenir 6 minutes au kilo, et ainsi être à l’heure à l’arrivée pour mes supporters. Pas faire attendre fiston et son amie, qui ont couru entre temps le 5 km. Enfin peut-être, car ils sont venus passer le week-end en danseurs : pas de certif’ médical. Et pour de vrai recalés car leur licence handball comme escalade est refusée par le jury. Bon concentrons-nous, je grignote, je grignote. J’ai un petit matelas, si je me relâchais un peu ? Ce fut donc un peu laborieux, mais sans trop. Mais pas trop d’étourderie : il ne faut jamais oublier les 195 mètres de clôture. Public ou pas, il faut prévoir tout de même 1’10, non ? Enfin j’y suis arrivé, avec l’homme à la plume sur mes talons. À bientôt pour d’autres aventures…

Marathon d’Orléans Sologne

1er. NICHOLAS CHERUYOT Chumba (il est Noir, mais ce n’est pas de sa faute) en 02:18:40, record pulvérisé…… 186 SUC André (je suis blanc, mais je n’y peux rien) en 3 h 59’ 47 sec. (15ème M3 sur 21 classés). 292 arrivants.